Le complémentiseur

Le complémentiseur

Le complémentiseur est un élément qui introduit une proposition complément d’une autre.

1- Paul dit que Marie viendra
2- Luc demande à Paul s’il travaillera demain.

Dans les phrases (1) et (2) les complémentiseurs sont « que » et « si » respectivement, ces deux éléments introduisent une proposition P2 qui fonctionne comme l’objet du verbe principal à savoir-faire » dans (1) et « demander » dans (2). Elle est donc complément de la proposition principale. Le complémentiseur est également un symbole abstrait noté « COMP » qui précède chaque proposition. L’origine du complémentiseur est ure constatation de parenté morphologique et syntaxique entre les relatifs et les interrogatifs ; alors toute phrase se représente en profondeur comme suit :

P¯➔ comp + P (P¯ = P barre)

3- Jean connaît l’étudiant à qui tu as prêté le livre. (qui = relatif)
4- A qui tu as prêté le livre ? (qui = interrogatif)
5- Le livre que tu as acheté est intéressant. (que = relatif)
6- Que penses-tu de Marie ? (que = interrogatif)

Les interrogatifs et les relatifs partagent la propriété d’être à la fois des pronoms et des marqueurs (des marqueurs d’interrogation et des marqueurs de relativisation). La nature du marqueur est réalisée « Qu ». Dansles deux cas les marqués en" Qu" peuvent jouer le rôle du subordonnant et de d’interrogatif. « Milner » les appelle des subordonnants liés car ils introduisent une subordonnée et ont une fonction grammaticale.

➢ On assiste à deux opérations :
a) Placement du « Qu »
b) Déplacement de l’élément marqué par « Qu »

7-a) Tu penses à ton travail à ton travail. (quoi)
b) Tu inviteras Paul. (qui)
c) Tu as passé les vacances à Paris(Où)

Les interrogatifs sont régis par deux transformations ; que l’on appelle respectivement : « placement de Qu » et « déplacement de l’élément marqué [+qu] » . La première transformation prend comme input une structure de la forme : *SN1 V SN2 et affecte l’un des deux éléments de cette phrase (7a : à SN2) le trait [+qu]

• Tu penses à ton travail.
Placement du qu

• Tu penses à quoi ?
Déplacement de l’élément marqué [+qu]

• A quoi tu penses ?

Exp : [ le garçon que[Pierre a vu] est gentils ]( []= P1 et[] = P2 )

Explication :

P1 : Le garçon est gentil
P2 : Pierre a vu le garçon.
Placement du qu

[ le garçon Comp[Pierre a vu. . .] est gentils ]
Déplacement de l’élément marqué [+qu]

Alors la phrase devient :[ le garçon que[Pierre a vu] est gentils ]


✓ La 2ème transformation déplace l’élément marqué [+qu] entête de la phrase. Cet élément est réalisé dans 7a par » à quoi », dans 7b par « qui » et dans7c par « où ».

✓ Si la transformation de déplacement ne s’applique pas dans le cas de : « Pierre lit un livre » l’élément marqué [+qu] reste postposé au verbe et se réalise par « quoi » : « Pierre lit quoi ». On peut constater le même phénomène en arabe marocain et on amazigh : (fin mchiti/ mchiti fin == taddid gar mi/ ma gartaddid)

✓ Les deux transformations sont également responsables de la génération d’une relative :

Exemple :
8- Le livre que lit Pierre est intéressant.

La phrase 8 est dérivée de la phrase 9 :

9- [Le livre [Pierre lit le livre] est intéressant]
Placement du [qu]

La phrase 9 sert d’input à la transformation de placement de « qu ». Cette transformation affecte le trait [+qu] au syntagme nominal complément d’objet du verbe subordonné, lequel syntagme est coréférentiellement identique au sujet de la principale le résultat de cette transformation est donné en 10 :

10- [Le livre [Pierre lit le livre] est intéressant]
[+ qu]

La seconde transformation, c’est-à-dire le déplacement de l’élément marqué [+qu], fait apparaître le constituant en question entête de Ph2 :

11- [Le livre [le livre Pierre lit . . .] est intéressant]
[+ qu]

Du moment que la structure 11 contient deux syntagme nominaux identique, la substitution du syntagme nominal redondant par un élément pronominal est de règle ; ce qui permet d’avoir la phrase de départ :
Le livre que Pierre lit est intéressant

❖ Considérons maintenant le cas des interrogatives indirectes.

Exemple :
12- Pierre demande Jean a passé les vacances à
La transformation de placement de « qu » s’applique à 12 et en dérive 13 :

13- Pierre demande Jean a passé les vacances à 
[+qu]

Le mouvement de l’élément marqué [+qu] permet d’avoir la structure 14 :

14- [Pierre demande [à==Jean a passé les vacances] ]
[+qu]

Étant donné que l’élément marqué [+qu] est [+ lieu-humain], il est réalisé par « Où » que l’on suppose être issu de « qu + y » ; «y » étant d’adverbe de lieu. La phrase finale sera 15 :

15- Pierre demande où Jean a passé les vacances.
( où est un complémentiseur)

✓ Les formes par lesquelles sont réalisés les éléments marqués par « qu » deviennent des complémentiseurs dans la mesure où elles occupent, en tête de la phrase, la même position que les complémentiseur « Qu » et « Si ».

✓ Les éléments marqués [+qu] sont exclusifs des complémentiseurs « qu »et « si ». Autrement dit, un élément marqué [+qu] ne peut pas être déplacé en tête d’une phrase introduite par «que » ou par «si ».

16- Déplacement impossible :
Comp

• Tu dis que Pierre a dit quoi ? ➔ici le déplacement de l’élément marqué [+qu], dans ce cas « quoi »est impossible ; car le complémentiseur est déjà pris par « que »
• *Tu dis que quand viendra Pierre. (deux complémentiseurs ne peuvent pas se succéder.)
• Tu demandes si Pierre ira où ?
• *Tu demandes si où Pierre ira ? (deux complémentiseurs ne peuvent pas se succéder.)

✓ S’il n’y pas de comp en tête de la proposition, la forme par laquelle est réalisé l’élément marqué [+qu] apparaît en tête de cette même position. Si la proposition qui contient l’élément en question peut se déplacer, l’opération s’effectue entête de la proposition précédente, exemple :

17- Tu veux que Pierre aille à ? (est marqué [+qu])
[Comp Tu veux [(comp= que ) Pierre aille où] ]et la phrase sera :
Où veux-tu que Pierre aille ?


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