L’isotopie sémantique

L’isotopie sémantique


L’isotopie 

sémantique



Le concept a été introduit en linguistique par Greimas dans Sémantique structurale (Greimas, 1986).

Le chapitre 4 de Sémantique interprétative (Rastier, 2009) présente l’histoire de ce concept et quelques usages qui en ont été faits par différentes approches.

Cet aspect historique ne nous retiendra pas ici. « Comme le mot homonyme de la physique, et préalablement à toute définition, il évoque, écrit Rastier, d’une part la notion d’identité et de similarité, d’autre part la notion d’appartenance à un champ, domaine ou lieu » (Rastier, 2009, p. 87).

L’isotopie sémantique est le résultat de la récurrence syntagmatique, dans une suite linguistique, d’un
même sème : « Les relations d’identité entre les occurrences du sème isotopant induisent des relations
d’équivalence entre les sémèmes qui l’incluent. » (Rastier, 2001a, p. 299). Autrement dit, une isotopie se présente comme une chaîne de sémèmes possédant au moins un sème en commun, générique ou spécifique.

La présomption joue un rôle important dans l’identification d’une isotopie ou d’un faisceau d’isotopies au sein d’un texte : on présume d’abord l’existence d’une isotopie et on procède ensuite à l’identification des occurrences du sème isotopant, et non l’inverse.

La notion de présomption renvoie à l’idée qu’on ne lit jamais un texte sans hypothèse de lecture concrétisant un point de vue.

La compétence interprétative du lecteur est, à ce titre, déterminante quant à qualité et la pertinence de la lecture produite. L’établissement de certaines isotopies, sans une connaissance approfondie du texte, de son inter-texte et de la tradition à laquelle il appartient, demeure non-concevable.

L’isotopie étant définie par la récurrence d’un même sème, la nature de celui-ci induit un type particulier d’isotopies. Selon que le sème isotopant est spécifique ou générique, l’isotopie sera dite spécifique ou générique. Etant donné que les sèmes génériques sont de trois sortes, les isotopies génériques se présentent donc également sous trois formes.


1. Les trois types d’isotopies génériques

i) l’isotopie micro-générique est induite par la récurrence d’un sème micro-générique, c’est-à-dire indexant des sémèmes du même taxème. Exemple : Et l’entrecôte, bleue, saignante, à point, bien cuite ? La récurrence, dans les sémèmes ‘bleue’, ‘saignante’, ‘à point’ et ‘bien cuite’ du sème /degré de cuisson/ assure une telle isotopie, car ce sème note l’appartenance à un taxème, celui du degré de cuisson.

ii) l’isotopie méso-générique est induite par la récurrence d’un sème méso-générique, c’est-à-dire indexant des sémèmes du même domaine.

Exemple : L’amiral Nelson ordonna de carguer les voiles.

Dans cet énoncé, on constate la récurrence du sème /navigation/ qui est commun aux sémèmes ‘amiral’, ‘carguer’ et ‘voile’. Puisque ce sème note l’appartenance à un domaine, cette isotopie sera dite méso-générique.

iii) l’isotopie macro-générique est induite par la récurrence d’un trait sémantique notant l’appartenance à la même dimension.

Exemple : Le hérisson insectivore n’est pas de la même famille que le porc-épic.

Le trait macro-générique /animé/, est présent dans la plupart des sémèmes de cet énoncé 11.
La récurrence des traits /intériorité/ et /extériorité/ dans les textes algériens de Bourdieu 12, induisent ce type d’isotopies.


2. L’isotopie spécifique

Enfin, une isotopies spécifique résulte de la récurrence d’un sème spécifique. La chaîne des sémèmes
incluant les occurrences du sème isotopant peuvent appartenir à des taxèmes, domaines ou dimensions différents, comme ils peuvent relever du même domaine et /ou de la même dimension, mais non du même taxème  13.

Exemple: L’aube allume la source (P. Eluard). Le trait /inchoatif/, présent dans ‘aube’, ‘allume’ et ‘source’, induit dans cet exemple une isotopie spécifique (Rastier, 2009, p. 112).

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