Les sons de la langue

Les sons de la langue


Les sons de la langue

Toutes les langues n’utilisent pas toutes les mêmes sons : par exemple, l’anglais a les consonnes « θ » (think) et « ð » (the), pas le français. Pour savoir quels sons sont vraiment utiles pour parler français et lesquels ne le sont pas, on les soumet à un test très simple : trouver ce qu’on appelle une « paire minimale ». Une paire minimale est un couple de deux mots pour lesquels tout est pareil sauf un seul son : si le sens du mot change, alors les deux sons sont distinctifs et font partie de l’inventaire de la langue ; si le sens ne change pas, alors la différence entre les deux sons est négligeable.

Par exemple, en français, le mot lot a un autre sens que le mot rot. Par conséquent, on sait que l et r sont deux sons différents en français. À l’inverse, en japonais par exemple, un mot avec « l » et un mot avec « r » n’auront pas deux sens différents : pour les Japonais, un mot prononcé aligato et un mot prononcé arigato ont le même sens : « merci ».

De plus, une vraie paire minimale permet de distinguer les deux sons dans toutes les positions dans le mot. Ainsi, en français, l et r sont distinctifs aussi à l’intérieur du mot : taboulé vs. tabouret, et à la fin : col vs. cor.

On peut donc dire que l et r sont deux phonèmes du français, car ils provoquent un effet de sens : utiliser l’un ou l’autre change le sens du mot. Mais « θ » (think) et « ð » (the) ne sont pas des phonèmes en français, car si quelqu’un prononce le mot cinq par exemple non pas avec « s » au début mais avec « θ », tous les francophones comprendront /sɛ̃k/, cinq, avec un « s ».

Inversement, le français peut produire deux « r » : l’un (noté χ) est non-voisé, c’est-à-dire que les cordes vocales ne vibrent pas, tandis que l’autre (noté ʁ) est voisé, c’est-à-dire que les cordes vocales vibrent ; vous pouvez tester ça en mettant votre main sur votre gorge et en prononçant les mots croc et gros par exemple : vous sentirez les vibrations en prononçant le second, pas le premier.

Ces deux sons, χ et ʁ, ne sont jamais prononcés dans le même environnement : on produit χ lorsque « r » est près d’une consonne non-voisée (prise, patrie, arc, offre, arsenal…), tandis qu’on produit ʁ partout ailleurs : en début de mot (robot), en fin de mot (cor), entre deux voyelles (tabouret) et quand la consonne à côté est voisée (brise, cadre, gras, ouvre…). On dit alors que ces deux sons sont en distribution complémentaire, c’est-à-dire que là où l’on trouve l’un, on ne trouvera jamais l’autre, et vice-versa, et qu’utiliser l’un plutôt que l’autre ne change pas le sens du mot : qu’on prononce le mot robot avec un « r » non-voisé ou avec un « r » voisé ne changera pas le sens : les francophones comprendront toujours le mot robot.

Trouver des paires minimales en français peut être un jeu amusant, par exemple en commençant sur
de petits mots, puis en essayant de trouver les mots les plus longs possibles où un seul son change le
sens (listes de paires minimales disponibles sur le web : 1, 2 et 3. Vous trouverez d’autres exemples
dans les tableaux récapitulatifs sur cette page). Mais attention : pour les apprenants du français, toutes
les paires minimales ne sont pas faciles à entendre, et inversement, certaines paires qui pour nous ne
sont pas distinctives peuvent l’être pour eux
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