La scène contemporaine

La scène contemporaine

La scène contemporaine


Tout au long de son histoire, le théâtre a déconstruit les notions d’imitation, de drame, de fiction, de narration et de texte. Protéiforme et transdisciplinaire, le théâtre contemporain est l’héritier de cette déconstruction. La remise en question des conventions théâtrales induites notamment par Antonin Artaud et les surréalistes dès le début du XXe siècle a eu un impact fondamental sur la fragmentation du genre théâtral d’aujourd’hui. Le théâtre contemporain est en quête de nouveaux types de questionnement et d’esthétique.

Le caractère hétérogène de la scène contemporaine ne permet cependant pas d’en dépeindre un portrait unique et général : « Si l’on essaie de définir un modèle contemporain, on parlera de croisements, de métissages, bref d’un théâtre au pluriel qui conjugue les éléments hétérogènes » (J.-J. Roubine, Introduction aux grandes théories du théâtre, p. 186). Et puisqu’il s’inscrit dans son époque, tout théâtre est aujourd’hui « contemporain », et cela même quand il s’inspire du répertoire classique.

Au centre des préoccupations du théâtre contemporain figure la question de la relation entre le spectacle et le public. Le regard du spectateur est revalorisé et intégré dans la conception même de la représentation. Le spectateur peut être amené à participer activement ou par sa réflexion en sollicitant son inventivité critique. C’est à lui de trouver un sens personnel à ce qui se déroule sur scène, d’éveiller sa perception et de l’orienter. Tendant à un art total, les artistes travaillent souvent de façon pluridisciplinaire en introduisant sur scène des photos, des peintures, des vidéos, de la musique et de la danse. Les progrès techniques permettent aussi de jouer avec le son, la lumière et l’image. Chaque metteur en scène peut exprimer sa conception personnelle du théâtre, livrer ses préoccupations et
sa vision du monde. La scène est aussi un moyen pour l’artiste de raconter simplement des histoires, ou de se raconter.

Deux exemples de la scène romande

Le travail de Fabrice Gorgerat (1971, Lausanne) et de la Compagnie Jours tranquilles est d’abord caractérisé par la pluridisciplinarité : le metteur en scène s’entoure, depuis ses débuts, d’une scénographe-plasticienne, d’un musicien, de costumières, et, dernièrement, d’un ethno-dramaturge pour créer des spectacles dont l’esthétique est une forme de langage. Pour ses dernières créations, la compagnie a travaillé avec des scientifiques autour de la notion de catastrophe. Dans Manger seul (2014), par exemple, la perte de l’habitude commensale (manger ensemble) et l’obésité comme épidémie mondiale sont portées sur scène.

Guillaume Béguin (1975, La Chaux-de-Fonds) avec sa Compagnie de nuit comme de jour, offre des tableaux subtils, mettant en scène des textes ou créant, avec les comédiens, des spectacles qui traduisent des préoccupations sociétales. Le théâtre sauvage (2015), par exemple, revient aux origines de la société et traite de la construction des mythes et rituels comme « garde-fous » moraux. En filigrane, le spectacle est aussi une réflexion sur les fonctions du théâtre, perçu lui aussi comme une forme quasi ritualisée et créatrice d’un sens commun.
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